Le 26 janvier Simon Uzenat a animé, devant une soixantaine de militants et sympathisants des sections PS de la circonscription, une conférence-débat sur le thème : "La Région Bretagne après Copenhague : modèle de développement et intégration internationale"
On notait la présence de personnalités socialistes, élus et candidats, comme Hervé Pellois, André Gall, Claude Jahier, Gildas Dréan, Monique Danion et Anne Camus.
Après une introduction de Thierry Normand, secrétaire de section, Simon Uzenat a exposé son analyse, dont voici de larges extraits :
"Les négociations internationales sur la lutte contre le changement climatique avaient pour objectif de parvenir à un accord à la 15ème Conférence des Parties qui a eu lieu à Copenhague du 7 au 19 décembre 2009.
Contrairement à ce qu’a pu affirmer le président de la République, le sommet de Copenhague représente un triple échec : échec d’une ambition à la hauteur des enjeux environnementaux, échec du système de gouvernance internationale proposée par l’ONU, échec des engagements en faveur d’une plus grande solidarité Nord/Sud.
Ce sommet a en effet accouché d’un accord qui n’a aucune valeur juridique et qui entérine une interprétation minimaliste du septième principe de la Déclaration de Rio (1992). L’ « Accord de Copenhague » se contente d’enregistrer la proposition du Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC) de limiter la hausse des températures à 2°C. Les éventuels engagements unilatéraux pris par les Etats, sans aucun mécanisme international de vérification et de sanction, doivent être fournis pour le 31 janvier 2010. L’accord prévoit également la création d'un "Fonds vert" pour le climat destiné à aider les pays en développement. Il s’agit là d’un financement temporaire et partiellement additionnel (par rapport à l’aide au développement), rendant en cela encore plus difficiles les montages de projets.
Plus globalement, cet accord symbolise les ambiguïtés de l’intégration des grands pays émergents (Chine, Inde) dans le processus international de régulation climatique. A cet égard, son échec révèle les nouveaux rapports de force internationaux. Sur la forme tout d’abord, avec la faillite de la gouvernance inter-étatique proposée par l’ONU. Sur le fond ensuite, car l’absence d’engagements contraignants en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre ainsi que l’extrême faiblesse des moyens alloués au rééquilibrage Nord-Sud ne sont absolument pas à la hauteur des enjeux, des attentes et des besoins. A ce titre, Copenhague marque un sévère coup d’arrêt au processus de Kyoto et signifie l’avortement du processus de Bali lancé en 2007.
Au-delà de tout ce qui a pu être justement écrit sur le rôle de la Chine (refus de mécanismes supranationaux de vérification et de sanctions) et des Etats-Unis (pas d’engagements chiffrés), l’échec de Copenhague est aussi celui de l’Union européenne, dont l’impuissance, les déchirements et l’incohérence ont pesé lourd au cours des deux semaines de négociations. Copenhague a consacré les limites d’une diplomatie européenne à choix multiples, empêchant l’émergence d’une voix unique. En cela, les initiatives solitaires du président français ont été autant contre-productives qu’une Commission européenne paralysée par les égoïsmes nationaux des droites européennes. L’Union européenne a été progressivement marginalisée au point de ne même pas être représentée lors des négociations finales.
C’est dans ce cadre qu’il convient d’apprécier la responsabilité historique des collectivités locales. Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques a ainsi déclaré à Poznan en décembre 2008 que « 50 à 80% des actions concrètes de réduction des émissions de gaz à effet de serre et près de 100% des actions d'adaptation sont conduites au niveau infranational ». Les régions se sont largement mobilisées afin de poursuivre leurs efforts, de réaffirmer leur rôle stratégique et d’assumer pleinement leurs responsabilités. Représentée par Jean-Yves Le Drian, la Région Bretagne portait ainsi la voix de 200 régions européennes, en tant que vice-présidente européenne du Réseau des Gouvernements Régionaux pour un Développement Durable (nrg4SD) et représentante de la Conférence des Régions Périphériques et Maritimes. L’efficacité de la lutte contre le changement climatique repose en effet sur deux piliers étroitement liés : une refondation du développement régional – à partir des opportunités offertes par la transition vers l’économie verte et bleue – et une mobilisation permanente en faveur de partenariats concrets entre régions du Nord et régions du Sud.
Cette implication massive des régions se heurte toutefois en France à un processus rampant de recentralisation. Qu’il s’agisse de la réforme de la fiscalité locale (qui réalise la mise sous tutelle étatique des collectivités locales), de la réforme des collectivités (qui programme la cantonalisation des régions et, partant, remet en cause toute élaboration d’une vision stratégique globale et partagée pour le territoire régional) ou encore du Grenelle de l’environnement (qui confère plus de devoirs mais moins de pouvoirs aux collectivités et les place sous l’autorité de l’État par l’intermédiaire des préfets), la force créative et l’efficacité opérationnelle des régions se trouvent largement affaiblies. Il ne reste que 100 mois pour agir. Afin d’empêcher une hausse des températures supérieure à 2°C, le GIEC a estimé – dans son 4ème rapport paru en 2007 – que les pays industrialisés devraient réduire d'ici à 2020 leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) de 25 à 40% par rapport à 1990. Les négociations internationales, qui vont se poursuivre en 2010 à Bonn (31 mai-11 juin) puis au Mexique (29 novembre-10 décembre) seront donc capitales et appellent d’ores et déjà une mobilisation encore plus forte des régions."
A l'issue de l'exposé, Simon Uzenat et Jean-Paul Méheust répondent aux questions de l'assistance.
-Le rôle de la Chine dans l'échec de Copenhague est patent. En refusant toute contrainte, la Chine a contribué à la mise à l'écart de l'Union Européenne, avec la bienveillance des Etats-Unis. L'Union Européenne, dirigée très majoritairement par les conservateurs, minée par un retour en force des Etats, n'ayant pas de réel pouvoir politique, n'a pas su s'imposer.
-Les questions relatives à la région Bretagne ont été nombreuses.
*Si la Bretagne est la région de France qui produit le plus de gaz à effet de serre, par son agriculture très développée, il faut se souvenir qu'elle contribue à nourrir de nombreuses autres régions françaises et européennes, partageant ainsi sa "responsabilité".
*La Bretagne produit peu d'électricité. Certes la région est bien placée pour les énergies renouvelables, comme l'éolien terrestre ou marin. Mais il faudra surtout agir sur la consommation. Et une coordination avec les autres territoires sera indispensable.
*La Bretagne doit prendre toute sa place dans une nouvelle PAC, Politique Alimentaire et environnementale Commune, permettant un retour aux fondamentaux pour un nouveau modèle de développement.
Dans tous ces domaines une meilleure coordination entre les régions françaises, surtout celles dirigées par la gauche, est éminemment souhaitable.
*A propos du "futur" aéroport de Notre Dame des Landes, qui concerne non seulement la Bretagne mais aussi les Pays de la Loire, il faut réexaminer et réactualiser le projet, la construction de lignes à grand vitesse vers l'ouest modifiant la donne. Mais il faut aussi tenir compte des problèmes actuels de sécurité sur Rennes et surtout Nantes.
-Le projet de réforme des collectivités territoriales va conduire à un effacement des régions et à une "cantonalisation" du territoire, chaque conseiller territorial soucieux de sa réelection défendant son pré-carré. Qu'en sera-t-il des projets demandant une grande cohérence, comme par exemple les plans climat-énergie territoriaux ?
-Le rejet, par le Conseil Constitutionnel, de la taxe carbone proposée par le gouvernement français est un échec majeur pour ce dernier. C'est une question qui devra s'intégrer dans un débat plus large sur la fiscalité. Dans un souci d'efficacité, elle devra être établie au niveau européen.
Différents liens :
Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques : http://www.unfccc.int/
International Institute for Sustainable Development : http://www.iisd.org/
Institut du Développement Durable et des Relations Internationales : www.iddri.org
The Climate Group : http://www.theclimategroup.org/
Network of regional governments for Sustainable Development : http://www.nrg4sd.org/
Région Bretagne : http://www.bretagne.fr/